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dimanche 20 octobre 2013

CRISE ECONOMIQUE MONDIALE 5



Une crise économique mondiale aux multiples dimensions

 

 Profits et bonus pour quelques uns, chômage et baisse des salaires pour beaucoup d’autres

La crise est terminée, le chaos économique ne fait que commencer.

 

Celles et ceux qui espèrent un changement de politique de la part de nos gouvernements sociaux-libéraux ou néolibéraux à la solde des grandes institutions financières, des marchés et des grandes entreprises vont être déçus : même au bord de l’abîme, nos décideurs resteront inflexibles, la boussole rivée sur l’austérité tant l’attirance pour un taux de profit maximal est forte et la croyance aveugle en la sacro-sainte croissance immuable.
 Nous savons pourtant par expérience – et à l’encontre de la théorie du ruissellement qui veut que la croissance se répercute mécaniquement du haut vers le bas des couches sociales – qu’un retour à la croissance du PIB ne bénéficie pas à la grande majorité de la population. Il suffit pour cela de regarder l’extrême pauvreté persistante en Afrique et dans les pays émergeants. Mais qu’importe, les grandes institutions font et refont sans cesse de nouveaux pronostics de croissance, tels d’inlassables bulletins météo de l’âge capitaliste, sans égard pour l’inégalité sur laquelle elle se fonde.
M. Draghi, personnalité de l’année ou culte de l’arrogance ?
Le 14 Décembre 2012, le président de la Banque centrale européenne M. Draghi, interrogé par le Financial Times sur la souffrance sociale infligée pas les cures d’austérité qu’il impose avec le FMI et l’UE en Europe, estime qu’ “abandonner maintenant (les politiques d’austérité), comme certains le suggèrent, reviendrait à gâcher les immenses sacrifices faits par les citoyens européens”. Malgré l’échec retentissant de ces politiques, le président de la BCE, sacré “personnalité de l’année ” par le même quotidien de référence financière pour avoir « grandement contribué à l’apaisement des marchés financiers en zone euro » , ne tient pas à décevoir et veut donc poursuivre la voie néolibérale tracée par Friedman (destruction totale de l’Etat social, privatisation…) quel qu’en soit le coût humain. La perte de souveraineté des Etats à la solde des créanciers ne l’inquiète pas puisqu’il dit œuvrer pour son rétablissement : “Les pays avec un endettement et des déficits élevés devraient comprendre qu’ils ont perdu leur souveraineté sur leurs politiques économiques depuis longtemps dans un monde globalisé. Travailler ensemble dans une union orientée vers la stabilité signifie en fait regagner de la souveraineté ”. Ainsi, nous regagnerions de la souveraineté dans une Union européenne qui a récemment reçu le prix Nobel de la paix sous les applaudissements de l’OTAN ? De quoi nous inquiétons-nous puisque l’on veille si bien sur nous ? Rappelons si besoin est, que le nouveau traité MES (mécanisme européen de stabilité) prévoit une totale immunité pour les actions prises dans ce cadre avec le droit qui lui est conféré de superviser les budgets de chaque Etat membre et d’infliger des amendes à ceux qui ne respectent pas les directives…de la BCE ; que de nouveaux gouvernements en Italie et en Grèce sont arrivés au pouvoir sans élection sous l’œil bienveillant de la BCE et de l’UE ; que dès mars 2012, les missionnaires de la Troïka (BCE-UE-FMI) se sont installé de manière permanente dans les ministères à Athènes pour fouiller dans les comptes publics. « Souveraineté » dites-vous M. Draghi ? En tout cas pas celle des peuples.
Salaires en baisse, chômage en hausse:
Contrairement à ce qu’avance M. Draghi, tout indique pourtant qu’un virage radical est plus que nécessaire et urgent. Un récent rapport de l’OIT (Organisation internationale du Travail, Rapport mondial sur les salaires 2012/13) confirme l’aggravation de l’inégale répartition des richesses produites, la part revenant au Capital continuant d’augmenter au détriment de celle revenant au Travail : « La tendance mondiale a entraîné un changement dans la distribution du revenu national, la part des travailleurs baissant tandis que les parts du capital dans le revenu augmentent dans une majorité de pays. ». Au niveau mondial, « Les salaires moyens mensuels ajustés pour tenir compte de l’inflation – ce qu’on appelle les salaires moyens réels – ont augmenté globalement de 1,2 pour cent en 2011 ». Si on ne tient pas compte de la Chine, « les salaires moyens réels n’ont augmenté que de 0,2 pour cent au niveau mondial en 2011 ». En Europe et au Moyen Orient les salaires ont baissé depuis 2008 alors qu’ils ont continué d’augmenter pendant la crise en Amérique latine et en Asie. Les pays européens, sous recommandation du FMI, réduisent les salaires réels alors que cela diminue la demande des ménages et contracte l’économie. En 2011, ils sont en baisse de 0,6% en zone euro, les travailleurs britanniques ont vu leurs rémunérations fondre de 3,5%, en Espagne elles ont chuté de 2% et de 1,6% en Irlande et en Italie. En Grèce, où le chômage frappe désormais plus du quart de la population active, les travailleurs ont vu leur salaire réduit de 6,2% en 2011. Le cas de la Grèce est important puisqu’il ouvre la voie au reste de l’Europe en commençant par sa périphérie. Le 3 décembre 2012, une étude menée par deux syndicats grecs, ADEDY et GSEE, a révélé que le pouvoir d’achat des Grecs avait été divisé par deux pendant les deux dernières années, un Grec sur deux vit en deçà du seuil de pauvreté . Revenant sur le rapport de l’OIT cité plus haut, d‘une manière globale, « Entre 1999 et 2011, l’augmentation de la productivité du travail moyenne dans les économies développées a été plus de deux fois supérieure à celle des salaires moyens. » Comme l’explique Eric Toussaint, cet écart permet l’augmentation du taux de profit de la classe capitaliste .
Dans un rapport précédent paru le 15 décembre 2010, l’OIT précisait déjà : « En Europe centrale et orientale, la croissance des salaires réels a baissé, passant de 6,6 pour cent en 2007 à 4,6 pour cent en 2008 et à −0,1 pour cent en 2009 . » La chute est vertigineuse !
Toujours selon l’OIT, le monde compte 30 millions de chômeurs en plus depuis le début de la crise en 2008 et parmi ceux qui ont un emploi, 900 millions de personnes perçoivent moins de 2 dollars par jour. Et c’est en Europe là aussi que l’on trouve les plus fortes augmentations du taux de chômage : selon Eurostat, au sein de l’Union européenne entre 2008 et 2012, ce taux est passé de 7,1% en 2008 à 10,6% au dernier trimestre 2012. En Espagne, le taux de chômage a bondi de 13,2% en octobre 2008 à 20,5% en octobre 2010 puis à 26,2% en octobre 2012. A Chypre et au Portugal il s’est élevé de plus de 3 points en un an, de juin 2011 à juin 2012 il est passé de 8% à 11,7% et de 12,7% à 15,9% respectivement. En Grèce il a doublé en 2 ans passant de 13,9% en octobre 2010 à 26% en septembre 2012 (il était de 7,8% en octobre 2008), 56% des 15-24 ans n’avaient pas de travail en septembre 2012, contre 22% en septembre 2008 .
Le luxe ne connait pas la crise:
Pendant ce temps, le secteur du luxe, dont les marques européennes représentent 70% du marché global, se porte à merveille avec une croissance de plus de 10% enregistrée en 2010-2011. LVMH , le numéro un français et géant mondial du luxe, a enregistré 3,06 milliards d’euros de bénéfices en 2011, un record historique. Pour profiter de la croissance du secteur, le groupe LVMH a même lancé sa marque Cheval Blanc pour conquérir l’hôtellerie de luxe. Son grand patron Bernard Arnault, première fortune de France, empochait la même année 10,8 millions d’euros , soit 821 années de Smic (l’année d’avant, en 2010, il avait déjà perçu 9,7 millions). M. Arnault, a vu sa fortune progresser en 2012 pour atteindre 29,7 milliards de dollars. Signalons au passage que le joaillier Bulgari, filiale de LVMH depuis 2011, est soupçonné de fraude fiscale par le gouvernement italien, pour avoir dissimulé près de 70 millions d’euros de revenus imposables en utilisant des sociétés basées en Irlande et au Luxembourg.
Même au-delà du secteur du luxe, les grands patrons s’en sortent bien malgré la crise : alors qu’en 2011, l’indice boursier de la place de Paris a perdu 17% de sa valeur, la rémunération moyenne des patrons du CAC 40 s’est élevée à 4,2 millions d’euros la même année, en hausse de 4% par rapport à 2010, année où les rémunérations avaient déjà flambé de 33% .
En Espagne, Amancio Ortega, patron de l’entreprise de textile Inditex propriétaire de Zara, Pull & Bear, Massimo Dutti ou Bershka, est devenu le 3ème homme le plus riche du monde, aidé par la propulsion en bourse des titres Inditex qui ont fait un bond de +66,7% en 2012. Selon le classement élaboré par Bloomberg en 2012 , sa fortune a augmenté de 62,9% par rapport à 2011, soit 22,2 milliards de dollars (16,8 milliards d’euros) de plus pour atteindre 57,5 milliards de dollars (43,5 milliards d’euros). Selon ce même classement, la richesse globale des 100 plus grosses fortunes du monde a progressé de 241 milliards de dollars en 2012 pour atteindre 1.900 milliards de dollars, bien plus que le montant de la dette externe publique de tous les pays en développement (1647 milliards de dollars en 2010). Ce montant du patrimoine des 100 personnes les plus riches de la planète représente plus de 5 fois la dette publique grecque, plus de 2 fois la dette publique espagnole et plus de 14 fois le montant de l’aide publique au développement (APD) que les Etats s’étaient engagé en 1970 – sans y parvenir depuis – à porter à 0,7% de leur revenu national brut (RNB).
Enfin, en dépit des beaux discours de M. Obama appelant à limiter les bonus de Wall Street, ceux-ci se maintiennent à un haut niveau : malgré une importante baisse en 2008 (voir tableau ci-dessous), ils ont de nouveau fortement augmenté en 2009. Depuis le début de la crise sur la période 2007-2011, les banquiers et courtiers de Wall Street ont enregistré 115,6 milliards de dollars de bonus.
La crise ne semble décidément pas avoir les mêmes conséquences pour tout le monde…
Evolution des bonus de Wall Street 1985 – 2011 (en milliards de dollars) :

Le graphique en PDF

CRISE ECONOMIQUE MONDIALE 4



Pays émergents: le début d'une nouvelle crise économique mondiale?


Les Indiens s'inquiétent de la glissade de la roupie et de la bourse de Bombay. Ils ne sont pas les seuls.


Depuis quelque temps, la devise indienne, la roupie, ne cesse de glisser face au dollar. C’est peut-être le symptôme d’une crise potentielle très grave qui menace l’Inde comme les autres pays émergents. Et nous ne sommes pas du tout à l’abri.
Le porte-parole du Fonds Monétaire International s'est ouvertement inquiété de l'évolution de l'économie indienne. Gerry Rice n'a pas mis de gants pour résumer la situation. Il a pointé trois points noirs: les déficits du budget de la balance des comptes courants, une inflation en permanence trop élevée et la dépendance vis-à-vis des flux de capitaux. Des handicaps traditionnels pour l'Inde qui se sont aggravés rapidement.Interrogé sur l'éventualité d'un plan d'aide pour l'Inde, le porte-parole du FMI a dit qu'il refusait de spéculer. Mais l'inquiétude est bien réelle. Dans le passé, l'Inde a déjà bénéficié de plans de sauvetage.
Gare à l’endettement:
Pourtant, voilà des années que l'on présente l'Inde comme une grande puissance économique en devenir et  même s'il ralentit, le taux de croissance de l'économie indienne reste encore à 5 %. Mais cela pourrait ne pas durer. L'Inde, comme les autres émergents, subit le contrecoup de la chute de la demande occidentale et, de manière plus aigüe, elle paie l'addition de la nouvelle politique de la Réserve fédérale américaine. La Fed est doucement en train de resserrer le crédit aux Etats-Unis, donc de rendre moins facile l'accès aux liquidités, ce qui provoque un important retour des capitaux sur le dollar. D'où la glissade, par exemple, du réal brésilien et donc aussi de la roupie. Avec de gros risques pour l'Inde comme l'explique Jean-Joseph Boillot, conseiller du Club du CEPII à Paris : " Lorsqu’il y a un fort ralentissement de l’économie et un interruption des flux de capitaux, on découvre d’un seul coup que le baigneur est tout nu et qu’il est endetté ".  Et de fait, l’Etat, les entreprises et les citoyens, l’endettement est généralisé en Inde. Le pays est donc susceptible d’entrer dans une crise grave qui, si elle se précise, aura de sérieuses conséquences : " Nous sommes dans une économie très interconnectée où les locomotives de l’économie mondiale sont des pays qui ont besoin d’augmenter le niveau de vie de leurs populations. On a besoin de leur croissance, ils en ont besoin et cela nous permet d’exporter ".
Un risque systémique:
Après la début de la crise en 2008, c'est bien le dynamisme des pays émergents qui a permis aux économies occidentales de garder la tête plus ou moins hors de l'eau. Mais voilà, ces pays sont à la fois nos clients et nos fournisseurs, comme ils le sont aussi entre eux. Si les Etats-Unis parviennent encore à se relancer plus ou moins sur leur demande interne, ils sont à peu près les seuls. D'où ce scénario pessimiste de Jean-Joseph Boillot : " Si tout à coup vous aviez une crise en chaîne sur les pays émergents, parce que l’Inde n’est que l’épiphénomène d’une tension qui se généralise, plus de la moitié du produit intérieur brut mondial va tout à coup arrêter de tirer le reste. C’est très inquiétant et c’est aussi très inquiétant que le sommet du G20 à Saint-Petersbourg des 5 et 6 septembre prochain n’ait pas mis à l’ordre du jour ce risque systémique ".
Michel Visart

CRISE ECONOMIQUE MONDIALE 3

Marc Fiorentino (c) Reuters
Marc Fiorentino


La crise est finie !


C'est parti. Depuis qu'on a annoncé que la croissance sera positive en 2013 et que le moral des Français rebondit, on va avoir droit à des sondages et des reportages qui nous expliquent comment la France repart et aux sourires satisfaits de François et Jean-Marc. Car on ne cherche même plus un retour à une vraie croissance. Avec 1% on serait au top de nos ambitions.

LA CONFIANCE DES FRANÇAIS
:
rebondit selon un sondage BVA. Un moral "économique" en hausse de 26 points en deux mois, du jamais vu... Prenons nous à rêver. Un jour, nous aurons une croissance de 1%. Génial. On est sauvés.

UN G20 SYRIEN ET ÉMERGENTS
:
On va parler Syrie et émergents au G20 qui s'ouvre aujourd'hui à Saint-Petersbourg. On attend un communiqué qui va dire que c'est vilain de tuer 100,000 personnes et que ce serait mieux si ça se faisait sans l'aide de la chimie. Et un autre où les pays émergents vont dire qu'ils vont briser la spéculation. Fantastique.

L'INDE TENTE DE SE REFORMER:
L'Inde, ce pays qui a fait rêver les investisseurs, le pays qui sera bientôt le plus peuplé du monde et un des leaders économiques mondiaux est en déroute. La classe politique n'a plus aucune crédibilité,  et la politique économique des derniers gouvernements a mené à un vrai désastre. Un nouveau patron de la Banque centrale est arrivé hier. Il a fait rebondir la roupie indienne qui avait atteint son record de baisse contre le dollar pour l'accueillir.

UN NOUVEAU CAUCHEMAR
:
On était déjà scotché sur nos smartphones à longueur de journées pour regarder n'importe quoi, maintenant on ne va même plus pouvoir se concentrer dix secondes pour regarder l'heure. Samsung a lancé sa smartwatch et le président de la division dit que c'est " un produit nécessaire avec des fonctions utiles". Dans deux ans, on se demandera comment on a vécu sans et on aura encore perdu le peu de capacité de concentration qu'il nous restait. Et on n'aura plus l'heure.

LINKEDIN CARTONNE
:

103% de hausse sur le titre depuis le début d'année. La société a annoncé qu'elle levait 1 milliard de dollars de plus. Peut être pour des acquisitions. Quand on aura nos réseaux sociaux accessibles sur notre montre et dans nos lunettes...

CRISE ECONOMIQUE MONDIALE 2




La crise fête ses cinq ans et elle se porte bien

Depuis 2008, la crise a pris plusieurs visages. Malgré l'optimisme ambiant, elle est loin d'appartenir à l'histoire. 
Cinq ans après la faillite de Lehman Brothers, rien n'y fait. Le PIB de la zone euro a beau s'être redressé au deuxième trimestre de 0,3 %, la Fed a beau réfléchir à une stratégie de sortie de l'urgence, l'optimisme a beau être de mise. La crise est toujours là. Et l'Europe est plus que jamais en première ligne.
Dilemme européen:
Les Etats européens demeurent confrontés à un dilemme insurmontable dans l'état des forces politiques actuelles : doit-on donner la priorité à la croissance ou au désendettement ? Les récents débats français viennent de le rappeler. Le gouvernement hexagonal, qui a tant fait le fanfaron en août sur les chiffres de la croissance est ainsi le premier à ne pas hésiter à prendre le risque de briser ce timide élan pour revenir au plus vite dans les clous fixés par le traité de Maastricht.
Poids de la dette:
Mais la question du poids de la dette empoisonne tout autant le Portugal, l'Irlande ou la Grèce. Des pays dont les demandes intérieures ont été sacrifiés sur l'autel de la dette et de la réduction des déficits et qui voient, malgré tout, le poids de leur endettement continuer à progresser. La troïka arrive au Portugal pour encore imposer de nouvelles mesures d'austérité et la Grèce ne peut guère se réjouir d'avoir dégagé un excédent budgétaire primaire qui sera englouti par le service d'une dette dont le poids est intenable.
Le « consensus européen » brisé:
Alors que l'Europe, et en premier lieu sa seule puissance crédible devant les marchés, l'Allemagne, semble incapable de faire des choix clairs, les effets de la crise n'ont pas fini de se faire sentir sur le vieux continent. Partout montent les  « populismes » qui remettent en cause le « consensus européen » qui dominait avant 2007-2008. Dans des pays traditionnellement europhiles comme l'Italie ou la Grèce, ces forces représentent des poids politiques désormais incontournables.  Le danger d'une progression encore plus forte et surtout d'une alliance stratégique avec un parti « de gouvernement » ne peut être écartée et ouvrirait un nouveau front dans la crise. On voit déjà que le rapprochement entre l'UMP et le FN en France ou celui de Beppe Grillo et du Parti démocrate en Italie est une hypothèse de travail. Dans ce cas, la confiance dans la zone euro pourrait encore en souffrir.
Economie mondiale en lambeaux:
Bref, rien n'est réglé, loin de là. Et l'accalmie ne doit pas cacher une autre réalité : cinq ans après Lehman les économies européennes et mondiales demeurent tout aussi instables et déséquilibrées. Les structures sociales et politiques sont en lambeaux. Le printemps et l'été derniers nous ont rappelé cette vérité. Le ralentissement  des exportations induit par le ralentissement européen a  provoqué des chocs sociaux, politiques et monétaires qui ont frappé pêle-mêle l'Egypte, la Turquie, le Brésil ou encore l'Inde.  Autre signe inquiétant : la tension  qui s'est emparé du marché boursier lorsque la Fed a annoncé sa volonté de réduire ses injections monétaires. Signe que nul ne croit en une croissance « autonome. »  Les marchés comme l'économie « réelles » sont sous perfusion.
Incapacités politiques:
Tout est à reconstruire, mais on a peine à croire que cette reconstruction puisse avoir lieu. L'incapacité des dirigeants mondiaux à gérer cette crise depuis six ans est désormais avérée. Lorsque le système financier a montré des signes de faiblesses à l'été 2007, on a nié le sérieux de l'affaire.  En 2008, on a géré la panique dans l'urgence. Pour éviter d'autres Lehman, on a renfloué les banques à coups de milliards. Aucun Etat n'a échappé à son « plan de sauvetage bancaire. » Pour rétablir la croissance, on a lancé des plans de relance sans véritable cohérence. Seuls comptaient alors les milliards que l'on promettait de placer dans l'économie. Aux Etats-Unis et  au Japon, on est entré dans la zone grise des taux zéro.
Mistigri de la dette:
Les banques ont survécu, pour la plupart. Mais les Etats sont entrés dans la crise. Le mistigri de la dette leur avait été transmis. La crise de confiance envers les banques est devenue une crise de confiance envers les Etats. L'Europe, avec sa construction monétaire baroque, s'est retrouvée en première ligne.  La crise de la zone euro a suivi. Elle aussi a été gérée en dépit du bon sens. Là aussi, on a d'abord voulu n'y voir qu'une « crise grecque » avant d'avoir recours à des méthodes radicalement opposées à celles de 2008-2009, mais tout aussi inefficaces et en réalité nocives.
Généralisation de la crise:
Les dirigeants mondiaux et européens, plus guidés par leurs intérêts domestiques propres que par l'intérêt général, ont mené une gestion de courte vue. Les Etats-Unis ont montré leur incapacité à gérer comme jadis l'économie mondiale. La Chine et l'Allemagne n'ont pas su ou pu s'imposer comme nouveaux leader. L'économie mondiale, privée de tête, s'est mise à errer dans le désert. On a transmis le mistigri à ceux qui étaient encore dans une situation saine : les banques centrales, les ménages, les émergents. Ces trois derniers acteurs ont fini par être infectés. Nous n'en sommes qu'à ce moment de la crise. Au début d'une crise qui peut finalement frapper l'ensemble de l'économie mondiale.
En faisant faillite, Lehman Brothers (qui a été cependant elle-même victime des conséquences de la crise des subprimes)  a ouvert plus qu'une crise économique. C'est une crise de la science économique, de la classe politique et de l'ensemble de la société post-industrielle qui s'est ouverte. Et elle n'est pas encore fermée.

CRISE ECONOMIQUE MONDIALE 1




La crise comme conséquence d'une économie mondiale sans tête

Sha
Dans "The Leaderless Economy", publié par les éditions de l'université de Princeton, Peter Temin et David Vines montrent que la crise actuelle est une "crise de transition" après la fin de l'hégémonie américaine. 
 La grave crise économique qui frappe le monde depuis 2007 a donné naissance à un nombre incalculable d'ouvrages qui tentent d'en comprendre l'origine, d'en décrire le déroulement, d'en trouver une issue. Sans compter ceux qui se livrent au bien périlleux exercice de la prédiction… S'il fallait n'en lire qu'un, sans doute, The Leaderless Economy, paru en fin d'année dernière aux Etats-Unis aux Editions de l'université de Princeton, devrait être celui-là. Issu de la collaboration entre Peter Temin, professeur d'histoire économique au MIT, et David Vines, économiste britannique à l'Université d'Oxford, cet ouvrage présente la crise que nous vivons dans un contexte historique, géographique et théorique des plus larges.
Déséquilibres globaux:
Le fondement de la réflexion des auteurs réside dans la nécessité de comprendre les déséquilibres économiques dans leur globalité. Autrement dit, en faisant en permanence le lien entre les déséquilibres internes des pays ou des grandes régions économique et leurs déséquilibres externes. Les auteurs montrent avec brio combien les décideurs économiques avaient perdu de vue cette réalité avant la crise actuelle, autant qu'avant celle de 1929. Et combien ceux qui doivent trouver une sortie à cette crise n'y songent pas davantage aujourd'hui qu'ils ont pu y penser durant les années 1930.
Crise de transition:
Mais alors comment expliquer que, à certains moments de l'histoire économique moderne, ces déséquilibres aient pu non pas disparaître, mais du moins être gérés afin de favoriser la croissance, la stabilité et la prospérité ? La réponse des auteurs est celle du leadership. En 1945, comme avant 1914, l'économie mondiale disposait d'une puissance hégémonique, le Royaume-Uni puis les Etats-Unis, qui était capable d'imposer « ses » solutions aux différentes crises et d'établir ainsi une cohérence mondiale.
Les grandes crises s'expliquent alors, selon les auteurs par une phase de transition où l'ancien leader n'est plus suffisamment fort pour imposer ses choix et où le futur leader n'est pas assez fort encore pour faire de même. « Le changement d'hégémonie est difficile : une nouvelle puissance hégémonique prend souvent du temps pour s'imposer après le déclin de l'ancienne. La grande crise de 1929 fut une de ces récessions de fin de régime, la crise actuelle en est une autre », expliquent les auteurs.
Deux après-guerres différentes:
D'où la différence frappante entre les deux après-guerres. En 1919, le Royaume-Uni ne peut plus être hégémonique. Ses actifs mondiaux ont été dépensés durant la guerre, ses grands marchés (textile, aciers...) ont été perdus au profit du « nouveau monde. » Londres ne peut plus dicter sa loi au monde comme il le faisait depuis 1815 par l'intermédiaire du Gold Standard. Pour autant, les Etats-Unis, devenue première puissance économique du monde, sont encore timides et refermée sur elle-même. Elle refuse l'entrée dans la SDN et est surtout le spectateur des crises qui secouent l'Europe des années 1920. Lorsque survient la crise, chacun tente alors de se sauver lui-même. En dévaluant ou, au contraire, en comprimant sa demande pour améliorer sa compétitivité. Il s'en est suivi le chaos, la spirale déflationniste, la guerre des changes, le protectionnisme… En 1944, les Etats-Unis se reconnaissent enfin comme puissance hégémonique. Pour éviter le même chaos que celui des années 1920, ils imposent leur solution : le plan Marshall. Ils favorisent l'intégration européenne et mettent sur place un système de change stable : Bretton Woods.
La crise actuelle:
Depuis le début des années 1970, la puissance américaine est en recul. Et aucune véritable puissance économique hégémonique n'a véritablement émergé. Les Etats-Unis ont conservé une influence notable, mais pas suffisante pour imposer le retour au calme, comme la crise de 2007-2008 l'a prouvé, tandis que les éventuels candidats à sa succession, Allemagne ou Chine, rechignent - ou refusent, ou sont incapables - d'assumer ce rôle. Les auteurs expliquent comment la crise de la zone euro s'est aggravée faute de la volonté allemande d'imposer une véritable solution globale, n'acceptant - à reculons - que des solutions partielles qui réglant des déséquilibre externes de la zone euro, ne réglait pas les déséquilibres internes, notamment la trop forte compétitivité allemande. En 1948, les Etats-Unis avaient utilisé leur puissance pour relancer la demande intérieure des pays d'Europe de l'ouest… De même, les auteurs expliquent comment la Chine, en raison de ses déséquilibres, peine à assumer son rôle d'hégémonie naissante.
Méthode originale:
L'ouvrage est brillant et décrit une forme de tectonique des plaques de l'économie mondiale depuis un siècle avec une grande clarté. La méthode utilisée est également des plus originales, par sa capacité à mener analyses d'actualité, réflexions historiques et importance des théories. Le dernier chapitre baptisé « utiliser la théorie pour apprendre de l'histoire » développe l'idée que l'histoire économique doit être lue au regard des théories afin de pouvoir être pleinement utile dans des conditions historique différentes. Une vision que, se lamentent avec raison les auteurs, les politiques du monde entier ignorent. Se contentant de gérer les urgences, signe supplémentaire d'une économie mondiale qui court comme un canard sans tête. Cinq ans après la chute de Lehmann Brothers, la lecture de cet ouvrage, qui propose aussi des solutions de gestion du monde actuel, demeure urgente.